Gauthier nous raconte sa traversée de la Turquie à vélo.
Salut Gauthier, peux-tu nous présenter ton voyage à vélo jusqu’en Australie ? Pourquoi ce projet ?
J’ai de la famille qui habite à Perth en Australie, des tantes et des cousins. Ça faisait un moment que je voulais leur rendre visite. Quand je me suis pris de passion pour le cyclotourisme, je me suis lancé le challenge d’aller jusqu’en Australie à vélo. C’est cette destination qui m’est venue naturellement en tête.
Grauves est un village situé à quelques kilomètres d’Epernay dans la Marne, en plein cœur du vignoble champenois. C’est là où j’ai grandi et où mes parents habitent encore.
Au total, mon itinéraire s’étale sur 15000km environ et traverse 25 pays sur 3 continents (Europe, Asie et Océanie). Je me trouve actuellement en Thaïlande et je vais entrer prochainement en Malaisie. J’attaque donc la partie finale de mon parcours. Mon voyage aura duré une année.
Parlons de ta traversée de la Turquie en particulier. Peux-tu nous décrire ton itinéraire en Turquie en détails ?
Je suis rentré en Turquie depuis la Grèce au mois d’août 2017 et j’ai roulé jusqu’à Istanbul où je suis resté une semaine. J’ai quitté Istanbul par ferry pour me rendre à Yalova un peu plus au Sud (ça m’a permis d’éviter la circulation anarchique de la ville). Puis j’ai roulé au bord du lac d’Iznik en direction Bilecik puis de Eskisehir. De là j’ai foncé vers le lac asséché de Tuz à une centaine de kms au Sud d’Ankara. La Cappadoce n’était plus très loin, j’ai donc rejoint le parc national de Gorëme pour découvrir ce site magnifique.
Puis de Kayseri à Sivas par une grosse route avant de rejoindre Erzincan et Bayburt pour entamer la fameuse route D915 réputée être l’une des plus dangereuses au monde. Elle m’a fait arriver sur la côte de la mer Noire que j’ai finalement longé vers l’Est jusqu’en Géorgie. Je suis resté en Turquie un mois complet au final.
- Kilomètres total : 1800kms
- Kilomètre par jour : 90kms en moyenne
- Dénivelés : deux cols franchis à plus de 2000 mètres et de nombreuses collines tout au long du trajet. Il faut savoir que c’est très rarement plat en Turquie.
Quels sont les plus du voyage à vélo en Turquie ?
L’hospitalité des Turcs et la nourriture bonne et bon marché.
Les points négatifs ?
Les conditions assez dures : relief, état des routes, distances importantes et chaleur (en été).
Quels ont été les plus beaux endroits sur ton parcours ?
- Entre le lac d’Iznik et Bilecik, les petites routes qui traversent des paysages de moyenne montagne sont agréables avec suffisamment d’ombre et de beaux points de vue.
- La partie au Sud d’Ankara : pas un chat sur les routes secondaires avec une succession de petits villages dans lesquels les habitants m’invitaient à partager thé et nourriture systématiquement.
- D’Erzincan à la mer à travers les montagnes : la D915 est assez incroyable et permet de sortir complètement des sentiers battus. C’est tout de même une étape difficile physiquement car il faut monter à plus de 2000m sur de la piste puis redescendre dans les mêmes conditions.
Etat des routes et circulation ?
Les routes principales sont énormes et très fréquentées avec des véhicules qui roulent vite. Elles sont équivalentes aux autoroutes françaises sauf que les vélos y sont autorisés donc pas vraiment l’idéal. Par contre elle sont en bon état.
Les routes secondaires sont en moins bon état (déformations, nils de poule, absence de marquages) mais plus agréables car moins fréquentées. Elles permettent de se rendre dans les petits villages et de vivre des choses intéressantes avec les locaux qui n’ont pas l’habitude de rencontrer des voyageurs. Cependant les distances augmentent sur ce type de routes donc cela prend plus de temps, il faut le prendre en compte.
Il y a aussi beaucoup de routes en construction un peu partout dans le pays, avec pas mal de poussière du coup. J’utilisais un masque de protection humidifié régulièrement.
Quant à la conduite turque, sincèrement, elle est assez sportive, surtout en ville. Ils ne font pas vraiment attention à toi !
L’accueil des Turcs ?
L’hospitalité des Turcs, c’est quelque chose ! Sincèrement il faut le vivre pour le comprendre. Les Turcs prennent soin des voyageurs et ils aiment aller à leur rencontre.
Déjà il y a le thé. On m’en proposait bien 10 fois par jour. Les gens m’arrêtaient sur le bord de la route carrément pour que je boive un verre avec eux. Puis ils ajoutaient souvent à manger : gâteaux, fromage, pain, miel, olives…
Il m’est arrivé à deux reprises lorsque je mangeais seul au resto, qu’un inconnu paie ma note spontanément ! Ou que l’on me paie un ticket de bus par exemple.
Quand j’avais un problème mécanique sur mon vélo et que je demandais de l’aide à quelqu’un (pour trouver une pompe ou un magasin de vélo par exemple), j’étais pris en charge immédiatement et sûr que mon problème allait être résolu dans l’heure.
Sans parler de l’aide qu’ils m’apportaient au quotidien pour trouver un endroit où planter ma tente ou pour trouver un hôtel pas cher.
Un autre exemple qui m’a marqué. Je m’apprêtais à monter un col à plus de 2000m sur la D915. J’avais de la nourriture avec moi mais je souhaitais la garder pour le soir. Je suis donc rentré dans le village juste avant la montée pour trouver un resto. J’ai demandé aux villageois s’il existait un endroit où manger ici. Et ils m’ont répondu que non mais qu’ils allaient me préparer quelque chose. Au final je me suis retrouvé avec un petit déjeuner énorme qu’on a partagé dans une salle avec tous les habitants du village. C’était incroyable, un très beau souvenir.
Sincèrement ce genre d’hospitalité, je n’ai vu ça qu’en Turquie. Les gens sont bienveillants et agréables, ça fait chaud au cœur.
Tu te débrouillais comment pour parler avec la population locale ?
L’anglais n’est pas très utile d’une manière générale. Par contre il existe beaucoup de mots transparents en turc (« bisiklet » par exemple) qu’on arrive à ressortir facilement.
Sinon il reste les mimes et les gestes. Les Turcs sont assez expressifs et communiquent facilement. Ils ont aussi un très bon sens de l’humour, ce qui aide. J’ai passé des soirées à rigoler avec eux sans aucun problème alors que je ne parlais pas la langue.
Niveau logement et nourriture, comment tu gérais ?
Pour dormir, je privilégiais le camping qui a l’avantage d’être économique. Aucun soucis en Turquie les gens te laissent camper un peu n’importe où sans problème. Il n’y a qu’à leur demander.
J’allais souvent camper derrière les stations services. Visuellement ce n’est pas les plus beaux spots que j’ai faits mais c’était super pratique. Le personnel mettait souvent à disposition du thé, de la nourriture et une douche. Ce qui n’est pas de refus après un jour à pédaler sous le cagnard ! Ça permettait aussi d’avoir un peu de compagnie de soir pour discuter.
Aussi il est en général possible de dormir dans les mosquées dans les villages où y a toujours une salle prévue pour les réceptions. Les habitants la mettent à disposition volontiers au(x) voyageur(s) pour une nuit.
Pour la nourriture, je m’autorisais un resto le midi en général. Ça me permettait de faire une bonne pause prolongée et de recharger la batterie de mon téléphone portable. Tandis que je cuisinais le soir des plats classiques, souvent à base de pâtes, forcément. Et le matin, c’était thé avec un muesli aux fruits et au yaourt. On trouve des petits magasins dans chaque village en Turquie. On ne tombe jamais en rade de nourriture.
Combien ça coûte de voyager à vélo en Turquie ?
En faisant du camping et en cuisinant soit même, on peut dépenser moins de 10€ par jour. En allant au resto le midi, on passe à 15€.
Pour une nuit à l’hôtel, il faut compter minimum 12€ pour une chambre basique.
Il m’est arrivé aussi de ne rien dépenser certaines journées car l’on m’offrait tout ce que je voulais acheter. Mais ça c’est plutôt aléatoire.
Tu peux nous décrire ton équipement (vélo + matos + camping) ?
- Vélo : VSF fahrradmanufaktur TX400 26 pouces (marque allemande)
- Pneus : Schwalbe Marathon Plus 1.75 pouces
- Sacoches de marque Ortlieb : 1 sacoche de guidon, 2 petites sacoches avants, 2 grandes sacoches arrières et un rack-pack à l’arrière
- Tente : MSR Elixir 2
- Réchaud : Primus multi-combustibles
- Sac de couchage : Tk2 de Sea to Summit
- Matelas de sol : Z-lite de Thermarest
Quel est ton meilleur souvenir de ta traversée de la Turquie à vélo ?
J’avais enchaîné environ 3 crevaisons en moins d’une semaine car mon pneu arrière était très usé. À la 4ème crevaison, je n’avais plus le nécessaire pour réparer. J’ai donc dû faire du stop et mettre mon vélo dans un camion pour rejoindre la ville la plus proche, Aksaray.
J’arrive dans la ville à la tombée de la nuit ne sachant pas où réparer mon vélo ni où dormir.
Je me mets donc à la recherche d’un magasin de vélo lorsqu’un jeune lui aussi à vélo m’aperçoit en difficulté et vient à ma rencontre.
Après lui avoir expliqué mon problème, il m’a trouvé un magasin pour faire mes réparations dans la foulée. Puis il m’a proposé de passer la nuit chez lui et m’a même invité à manger au restaurant. Tout ça le jour de mes 30 ans !
C’est le genre de rencontres que l’on fait quotidiennement en Turquie. Elles ne s’oublient pas !
La pire galère ?
J’ai fait une vilaine chute sur un chemin après que mon porte bagage avant a bloqué ma roue. J’avais perdu une vis, je ne m’en étais pas aperçu. J’ai fait un joli soleil qui m’a valu quelques égratignures.
Et comme si ça ne suffisait pas, après m’être relevé en commençant à partir pour demander de l’aide, je tombe nez à nez avec un gros chien. Si bien que j’ai du faire demi tour et traverser un terrain vague accidenté pour rejoindre la route la plus proche.
J’étais très énervé sur le coup mais maintenant j’en rigole !
Le point positif, c’est que j’ai ensuite été pris en charge par le personnel d’un gymnase qui se trouvait à côté. Ils m’ont soigné, m’ont donné à boire et à mangé et m’ont même trouvé un endroit où dormir gratuitement le soir.
C’est systématique en Turquie lorsqu’il t’arrive une galère, ça débouche sur une belle rencontre et sur de bons moments.
Un dernier mot pour convaincre les lecteurs du blog de partir découvrir la Turquie à vélo ?
Sincèrement il ne faut pas se dire qu’aller faire du vélo en Turquie va être facile et reposant. Non ! Les conditions sont difficiles : relief, état des routes, chaleur en été. De plus tu dois être sur tes gardes en permanence à cause des chiens qui sont très gros en Turquie.
Cependant, il y a de très beaux paysages à voir et des sites touristiques fascinants. Et les Turcs compensent largement toutes les galères que tu peux avoir sur la route. Rien que pour goûter à leur hospitalité et à leur gentillesse, il faut y aller. Ils sont géniaux !
Retrouvez le voyage complet de Gauthier Devie sur sa page Facebook
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