Frédéric Lepron a traversé l’Afrique à vélo en trike (vélo couché). 20 000 km et des souvenirs en pagaille, qu’il a accepté de partager avec nous.
Traversée de l’Afrique à vélo : préparation du voyage
Pourquoi se lancer dans cette aventure folle de traverser l’Afrique à vélo ?
D’abord ce n’est pas si fou que cela quand on est bien préparé 😉 J’ai une passion pour ce continent depuis mon enfance et les récits d’un grand oncle missionnaire Père Blanc. Une passion entretenue par la suite avec la littérature, les films et mes nombreux voyages touristiques dans de nombreux pays d’Afrique.
Je n’avais jamais voyagé à vélo mais j’ai une bonne connaissance du terrain et une habitude des bivouacs et des contraintes que cela engendre. Le trike n’est pour moi qu’un moyen de se déplacer, l’essentiel est ailleurs dans le partage, les rencontres, les découvertes. Mon projet était centré sur l’humain et je dois dire que je n’ai pas été déçu.
Comment prépare-t-on un tel voyage ? Comment choisir les pays que l’on va traverser par exemple (climat, déserts, routes, sécurité, etc.) ?
C’est environ 6 mois de préparation intense, beaucoup de recherches sur internet pour le choix du matériel, la sélection du vélo, les contraintes administratives…
Il faut s’informer des conditions d’accès dans les pays, des possibilités de communications, des assurances, quelle balise de localisation et de secours, envisager le pire (procuration, testament), préparer le meilleur 😉 Et puis il faut bien sûr le préparer dans sa tête, bien réfléchir à l’impact d’un tel voyage et penser aussi au retour.
La magie pour moi c’est de me lever le matin sans savoir où je vais être le soir, ce que je vais manger, qui je vais rencontrer, comment je vais dormir.
Le choix des pays se fait avant tout sur le désir, ensuite on envisage un itinéraire en fonction des contraintes géographiques et de sécurité. J’ai aussi choisi une date de départ pour éviter au maximum les saisons des pluies. En 15 mois j’ai dû avoir une douzaine de fois de la pluie et la plus longue a duré 2 heures.
Ensuite en fonction des envies, des contraintes de sécurité ou de visas l’itinéraire a évolué. Mais je n’ai jamais eu un itinéraire précis du type « ce soir je serai à tel endroit, dans 8 jours ici et le mois prochain là ». Au contraire la magie pour moi c’est justement de me lever le matin sans savoir où je vais être le soir, ce que je vais manger, qui je vais rencontrer, comment je vais dormir. D’où l’intérêt de l’autonomie.
Afrique à vélo : itinéraire
Pouvez-vous nous décrire votre itinéraire en détails ? Combien de temps a duré ce fantastique voyage ?
Je suis parti début Octobre 2015 de Tanger, l’itinéraire a été le suivant:
- Maroc
- Mauritanie
- Sénégal
- Mali
- Burkina Faso
- Ghana
- Togo
- Bénin. A Cotonou j’ai pris un vol pour Entebbe en Ouganda, ensuite:
- Kenya
- Tanzanie
- Malawi
- Zambie
- Zimbabwe
- Botswana
- Namibie
- Afrique du Sud et une arrivée à Cape Town fin décembre soit 17 pays, 16000 kms, 15 mois de voyage.
Ma distance quotidienne à vélo variait évidemment en fonction des contraintes climatiques, vent, chaleur ou topographiques: rien à voir entre le désert en Mauritanie et les cols à 2800 M au Kenya. En moyenne c’est environ 70 kms par jour, maximum 130, minimum 15.
Je n’avais aucune contrainte de temps ou de budget, cela laisse une grande liberté de pouvoir s’arrêter même juste après quelques kilomètres au hasard des rencontres ou l’envie d’un bain dans le lac Malawi par exemple. Enfin j’avais entre 110 et 130 kgs de charge donc polé-polé comme on dit en Swahili ce qui signifie « doucement ».
Quel pays avez-vous préféré ?
C’est LA question à laquelle je ne peux pas répondre. Très sincèrement, chaque pays m’a séduit quelque fois pour des raisons différentes: la culture, les paysages, les populations, une histoire particulière.
J’ai quand même eu un coup de coeur pour deux pays mais sans doute car je ne les connaissais pas avant: le Malawi et l’Ouganda. Pour des raisons d’ailleurs similaires: la beauté et la variété des paysages, la gentillesse des populations. Aujourd’hui d’ailleurs j’ai décidé de vivre en Ouganda.
Quels ont été les plus beaux paysages sur votre parcours ?
Là aussi difficile d’y répondre ! J’ai autant aimé les déserts de Mauritanie et de Namibie que les falaises de la côte marocaine, le bush du Burkina, les plages du Lac Malawi, la forêt impénétrable de l’Ouganda, les montagnes de l’Afrique du Sud, les plaines du Serengeti. L’Afrique est riche et variée aussi dans les paysages.
Au contraire, y a-t-il un pays que vous avez moins apprécié ?
Pour être honnête je dirais le Sénégal qui est pourtant magnifique avec une culture incroyable et où j’y ai de bons amis, mais le rapport à l’argent y est vraiment pesant. Ce n’est pas un reproche, nous en sommes largement responsables.
Quel est le peuple qui vous a le plus marqué ?
Peut être les Burkinabés et leur incroyable propension à rire de tout. C’est un pays rude, au climat extrême, ils viennent de sortir d’une dictature, d’une tentative de coup d’état, les attentats et malgré tout la joie de vivre et l’optimisme dominent.
Vous vous organisiez comment niveau logement ?
J’étais en totale autonomie pour avoir la liberté de m’arrêter où et quand je le voulais. J’ai dû faire 50% de bivouac à la fois au milieu de nulle part et au coeur des villages. Le reste c’est un mélange d’hôtels, guest house, lodge, campsite, chez l’habitant ou dans des lieux parfois improbables.
Afrique à vélo : questions pratiques
Pouvez-vous nous décrire votre équipement ? et ce que vous en avez pensé ?
J’ai donc effectué cette traversée sur un trike Azub Tricon spécialement préparé par Velofasto à Rennes. Il était équipé de
- pneus Schwalbe marathon plus de 20 pouces, idem sur la remorque, quasiment increvables
- deux moyeux dynamo Son pour recharger en roulant tout mon matériel en USB
- d’un moyeu de transmission Rohloff 14 vitesses intégrées dan le moyeu (plus de soucis d’usure ou d’entretien).
Mon équipement:
- 6 sacoches étanches Ortlieb
- un GPS Garmin, un compteur classique
- une balise de localisation et de secours Inreach
- une remorque Y frame sur laquelle j’ai installé une malle alu étanche et amovible qui me servait de table au bivouac. C’était aussi le support d’un panneau solaire souple pour la recharge de mon ordinateur.
Au niveau bivouac:
- une tente MSR Hubba avec extension
- un matelas auto gonflant Thermarest
- un duvet Wilsa
- un hamac Décathlon
- une lampe frontale Petzl à recharge USB
- un couteau multifonctions Leatherman Surge
- un couteau Suisse (il n’y a pas de tire bouchon sur un Leatherman ;))
- un réchaud multi combustible Optimus
- un set de popotes Optimus
- une pompe filtrante Katadyn
- une lampe UV traitement de l’eau Steripen.
Au niveau moyens de communication:
- deux Iphones 6 et 7
- un MacBook air
- deux disques durs
- deux caméras GoPro
- un drone Parrot
- un Lumix GH4: j’ai réalisé des chroniques vidéos pour TV Vendée diffusées chaque semaine durant mon périple.
De manière incroyable tout a fonctionné jusqu’à la fin à quelques exceptions prêts et donc je n’aurais pas grand chose à changer si je devais repartir.
Votre souvenir le plus marquant de votre voyage à vélo en Afrique ?
Une incroyable sérénité qui s’est emparée de moi aux premiers tours de roues et qui ne m’a pas quitté.
Ce n’est pas un souvenir en particulier, il y en a trop, mais un sentiment d’ensemble. Une incroyable sérénité qui s’est emparé de moi aux premiers tours de roues et qui ne m’a pas quitté. La sensation d’être là où je devais être et le sentiment profond au retour que l’on est vraiment fait pour vivre ensemble. Il suffit juste d’avoir l’envie de découvrir, d’accepter, d’échanger, de s’ouvrir.
Des grosses galères pendant ce voyage ?
Là aussi, incroyable ! Que ce soit la santé, le matériel ou la sécurité je n’ai connu aucune grosse galère. Physiquement cela n’a pas toujours été facile mais le secret c’est d’avoir le temps et de ne se mettre aucune pression. Mon projet n’était pas un défi, j’avais en tête de pouvoir m’arrêter à tout moment et de rentrer chez moi. Je voulais avant tout aller vers l’humain et sur ce plan j’ai été largement récompensé de tous mes efforts.
Au niveau santé pas grand chose, une attaque de taons et une cinquantaine de piqûres, une perte de connaissance sur un carrelage un peu rude: nez cassé, arcade ouverte et incisives branlantes, deux fois deux jours de fièvre, une gastrite. Pas de palu, pas de bilarzioze, pas d’infections, pas une seule gastro.
Aucun soucis au niveau sécurité: pas un vol, pas une agression alors même que j’ai souvent laissé le trike tout seul dans la rue ou les villages avec tout son matériel.
Votre prochain voyage à vélo, c’est dans quel pays ?
J’avais envisagé un AsiaTrike, un aller retour de 30000 kms à Pékin en 2018 mais l’Afrique est trop forte ! Je vais m’installer en Ouganda pour y organiser des découvertes de l’Afrique que j’aime et notamment en organisant des treks à VTT, avis aux amateurs !
C’est notre premier article sur l’Afrique, et quel voyage ! Merci à Frédéric d’avoir bien voulu répondre à nos questions. Retrouvez ici la chaîne Youtube d’AfricaTrike ici et sa page Facebook là. Frédéric sera au Festival du Voyage à Vélo à St Denis le week-end du 20/21 Janvier 2018, venez le rencontrer !
Un voyage à vélo en Afrique, ça vous tente ? Si vous avez réalisé d’autres circuits à vélo dans cette région, ou que vous comptez y aller, dites-nous tout en commentaire de cet article !
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Quelle aventure incroyable ! Bravo !
Merci Robin pour votre gentil commentaire, c’est clair que l’aventure de Frédéric est vraiment hors normes !
Bonjour. Super… egalement je rentre de voyage a velo en afrique, autres pqrcours.
Comment s’est realisé la traversé des frontieres en Afrique de l’ouest avec les visas ?
Merci.
Bonjour Guillaume, merci pour votre question. Vous pouvez contacter directement Frédéric sur sa page Facebook (lien vers la fin de l’article).
Vous préparez un voyage en Afrique de l’ouest ?
Bonnes préparations !!
Pour ma part, j’ai eu l’occasion de partir à Abidjan et je dois dire que c’est un pays fascinant. Les gens sont sympas et la bouffe, c’est un vrai délice. Je donnerai tout pour manger un bon plat d’attiéké avec du poisson braisé et des alloco.
bravo que dieu te garde
merci pour ce premier épisode marocain. que de bons souvenirs ravivés par ces images. à quand la suite?
…je veux dire quand la suite du film! j’aimerais bien voir les images en Afrique de l’ouest où j’ai eu le plaisir de pédaler!